Après les fêtes de Pâques, des lapins offerts aux enfants sont souvent abandonnés à Central Park, poumon vert de New York. Mais le bref passage de ces petites boules de poils vite confiées à un refuge ne peut cacher un phénomène qui intrigue les responsables du célèbre parc: on n'a pas vu de lapin sauvage depuis quatre ans environ. Lire la suite l'article
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Et c'est d'autant plus surprenant que c'est le seul espace vert de la ville dans ce cas, affirme Sarah Aucoin, directrice des gardes forestiers (rangers) des parcs municipaux new-yorkais. Les lapins vivaient à Central Park avant même la réalisation il y a 161 ans de cet espace public qui s'étend sur 341 hectares, en plein coeur de Manhattan.
"Cela fait 17 ans que je suis ici et il n'y en avait pas beaucoup quand je suis arrivée, mais j'en voyais de temps en temps", témoigne dans un courriel Regina Alvarez, directrice horticole de l'association Central Park Conservancy, qui s'occupe du gigantesque parc pour la ville.
On ne peut pas exclure que quelques lapins aient creusé leur terrier là où ils trouvent à se nourrir, dans l'épais sous-bois. Si tel est le cas, et sachant que ces mammifères herbivores se reproduisent, comme leur nom l'indique, "comme des lapins", "on constatera forcément une augmentation" de leur population, souligne Sarah Aucoin, ajoutant avec prudence que "le temps nous le dira".
Le biologiste spécialiste de la vie sauvage Alan Hicks rappelle de son côté que les lapins de garenne sont particulièrement vulnérables aux conditions météorologiques, aux prédateurs et aux voitures. Or une récente tempête a déraciné de grands arbres de Central Park, qui est traversé par plusieurs routes. On y observe aussi fréquemment des aigles et des faucons, et rien ne dit qu'un coyote n'y traîne pas, puisque l'un d'eux avait été repéré en 2006.
Pour Mme Aucoin toutefois, la piste de prédateurs plus nombreux qui auraient mangé les lapins n'est pas convaincante car les prédateurs évitent normalement d'épuiser leur ressource alimentaire. "Ce n'est pas malin, du point de vue de l'évolution", explique-t-elle, "cette population prédatrice s'éteindrait si elle n'avait rien à manger".
Faute d'explication satisfaisante à la disparition de Jeannot Lapin, les responsables de Central Park tentent de l'encourager à revenir. La municipalité s'emploie ainsi à arracher les plantes envahissantes et à en faire pousser d'autres qui rendent ce vaste espace vert plus vivable pour les petits animaux. "Quand les gens voient un animal sauvage, même si c'est juste un lapin, cela les aide à entrer en relation avec l'environnement d'une manière plus concrète", estime Sarah Aucoin. "C'est une relation vraiment importante que nous essayons d'encourager dans cette ville".
En attendant, les lendemains de Pâques restent le seul moment où l'on trouve à coup sûr un ou deux lapins à Central Park, abandonnés par des familles dont les enfants se sont en général lassés de s'occuper d'un animal domestique. Les rangers récupèrent les animaux et les confient à un refuge.
"C'est un problème terrible" que dénonce Mary Cotter, professeur de technologie vétérinaire au LaGuardia Community College, dans le quartier du Queens. Avec sa propre association, elle tente de sensibiliser les maîtres indignes par une campagne d'affichage à New York. "Les lapins domestiques ne survivent pas dans le parc", insiste-t-elle, et seuls "ceux qui sont capturés et emmenés au refuge ont de la chance". AP